En écho à l’Exposition Universelle de Shanghai, les jardins du Palais Royal accueillent une sélection d’œuvres monumentales réalisées par quelques-unes des personnalités les plus en vue de la communauté artistique chinoise en France. World Expo Shanghai 2010 est sans aucun doute l’un des événements majeurs qui marquera ce début de 21e siècle, témoin de la vivacité d’un État continent en pleine expansion. Cette événement est en passe de bouleverser le paysage architectural et culturel de la capitale économique chinoise à la manière des expositions universelles du début du siècle qui ont marqué durablement la géographie urbaine parisienne.
Pendant un mois, les sculptures présentées dans les jardins du Palais Royal vont jeter un pont entre les deux cités, en mettant en exergue les démarches de ces artistes d’origine chinoise, établis en France au tournant des années 1990, partagés entre ces deux pays, leurs cultures et leurs histoires. Marquée par une éthique libertaire, cette pléiade d’artistes s’avère être aujourd’hui des figures clés du paysage artistique contemporain mondialisé, ce qui constitue cela va de soi un motif de fierté supplémentaire de les savoir intégrés à Paris.

Huang Yong Ping met en place un discours critique des cultures occidentales et orientales. La plupart de ses œuvres mettent en scène le règne animal, au cœur de la vie dans la culture chinoise, pour son caractère symbolique. Installé dans une carriole à l’arrêt et sans monture, un buffle empaillé évoque la monture traditionnelle Lao-Tseu, métaphore de la pensée de ce sage chinois, qui se refusait à la globalisation, en recommandant d’atteindre à la compréhension du monde sans franchir la porte de son foyer. L’œuvre de Shen Yuan témoigne d’une réalité de l’histoire chinoise récente, le Barrage des Trois-Gorges, manne financière, connu comme le plus grand générateur d’électricité au monde mais aussi et surtout désastre écologique, humain et culturel. Empruntant à l’art chinois de la représentation du paysage, Shen Yuan sculpte dans ses Ventres de Pierre, les déclinaisons de ce paysage ravagé. Le travail de Wang Du s’organise autour de son obsession pour les médias dont il extrait les images les plus frappantes, créant une « post-réalité », oscillant entre monde réel et monde créé par les médias. Gigantesques et travaillées par les perspectives accusées de l’objectif photographique les mannequins extraits de magazines et modélisés en volume ou les journaux surdimensionnés et froissés en aciers blanc jalonnent le parcours dans les jardins. Yang Jiechang propose quant à lui une utopie réalisée, Eurasia, une nation au croisement de l’Asie et de l’Europe à laquelle il donne existence par un drapeau et des rencontres sportives. Yan Pei-Ming, l’un des premiers artistes chinois de la génération Tiananmen à s’installer France, est devenu le portraitiste emblématique des personnages mythiques de notre époque.

De larges aplats en camaïeu de noir et gris émergent des visages monumentaux dans la masse picturale. L’installation Landscape of Childhood composée de drapeaux qui flottent au vent est un regard porté vers l’avenir incarné par les visages de très jeunes chinois, enfants d’immigrés aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur. Le Jardin Mémorable de Chen Zen présente cinq vues en relief dédiées à la contemplation du fabuleux jardin impérial chinois du Yuanmingyuan, détruit par les troupes franco-anglaises en 1860. Ne subsiste de ce jardin mythique, inscrit dans la mémoire collective chinoise, que quelques dessins datant du 18ème siècle, conservés non loin à la BNF. Cet immense parc abritait la flore et les paysages typiques à chaque région de la Chine, se voulant un modèle en miniature de l’univers. Certains éléments, comme les jets d’eau, étaient empruntés, par l’intermédiaire des missionnaires, aux jardins européens, témoignant d’une forme précoce de multiculturalisme.

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